Conjoncture
Les pertes d’emploi des entrepreneurs repartent à la hausse
Frappés par une conjoncture économique incertaine, les chefs d’entreprise sont de plus en plus nombreux à être confrontés au chômage. Plusieurs grands secteurs d’activité se trouvent en difficulté, particulièrement la construction et le commerce.
En phase avec la remontée des défaillances d’entreprises, davantage de dirigeants perdent leur activité professionnelle. D’après l’Observatoire de l’emploi des entrepreneurs, étude réalisée par le cabinet Altares, spécialisé dans l’information sur les entreprises, et l’association patronale GSC, 25 296 patrons se sont retrouvés au chômage entre janvier et juin 2023. Ceci correspond à une hausse de 36,6 % sur un an, renouant ainsi avec le niveau d’avant pandémie. Plusieurs facteurs contribuent à la fragilisation des entrepreneurs : l’inflation, la hausse des coûts des matières premières et des taux d’intérêt, le remboursement des PGE (prêts garantis par l’État) ou encore la baisse des carnets de commandes. «Dans ce contexte, le nombre de défaillances d’entreprises, et donc de pertes d’emplois de dirigeants, continuera de progresser au cours du second semestre 2023, mais encore en 2024», prévient Frédéric Barth, directeur général d’Altares.
Certains secteurs plus souffrants que d’autres
La construction figure au premier rang des secteurs impactés, enregistrant 5 713 nouvelles pertes d’emploi chez les entrepreneurs, ce premier semestre. Le commerce suit avec 5 614 patrons en situation de chômage. À un an d’intervalle, ces chiffres progressent respectivement de 50 % et 47,2 % pour ces deux secteurs qui représentent quasiment la moitié des liquidations judiciaires enregistrées à l’échelle nationale. L’hébergement-restauration, les débits de boisson (+ 65,9 %) et les services aux particuliers (dont la coiffure et la beauté) ont également été affectés par la réduction des dépenses des ménages engendrée par la flambée des prix. Mais la plus forte hausse des faillites (+ 76,4 %) a été constatée dans le domaine de l’assurance et de la finance, principalement chez les courtiers et gestionnaires d’actifs, fragilisés par les tensions sur l’immobilier. Le secteur des services aux entreprises semble le plus épargné, avec une augmentation de 39,8 % «mais de fortes disparités apparaissent entre les activités», souligne l’étude.
Les seniors particulièrement vulnérables
S’agissant des profils des entrepreneurs, les seniors restent les plus touchés par les pertes d’emploi. Plus d’un tiers des dirigeants concernés ont plus de 51 ans, ce qui impacte leur capacité à rebondir professionnellement. Mais, la hausse du taux de chômage est aussi alarmante chez les dirigeants de moins de 30 ans (+ 40,1 % pour les moins de 26 ans ; + 43,2 % pour les 26-30 ans), et «pose la question de l’accompagnement de ces jeunes chefs d’entreprise face au risque de perte d’emploi», pour l’Observatoire. Les tranches d’âge 31-40 ans et 41-50 ans paient également un lourd tribut avec respectivement 6 282 et 6 803 entrepreneurs ayant cessé leur activité. En ligne avec les liquidations judiciaires, les dirigeants à la tête de petites structures de moins de cinq salariés enregistrent environ 90 % des pertes d’emploi, ce premier semestre. Cependant, les autres structures n’ont pas échappé aux défaillances : le nombre de chefs d’entreprise touchés comptant entre 20 et 49 salariés a plus que doublé sur un an (+ 104,4 %). De même, pour ceux déclarant plus de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires, la hausse est estimée à plus de 100 %. Les professions libérales sont, en revanche, nettement moins impactées avec une hausse de 10,2 %.
L’Île-de-France, région la plus touchée
Au niveau territorial, aucune région n’échappe à cette dégradation. Dans près de la moitié d’entre elles, la hausse des pertes d’emploi se chiffre à plus de 50 %, note l’étude. Compte tenu de son poids économique, l’Île-de-France est celle la plus frappée par le chômage des entrepreneurs : près de 5 500 d’entre eux ont été touchés ce premier semestre, soit une hausse de 47,9 %, Elle est suivie par l’Auvergne-Rhône-Alpes qui compte 2 900 dirigeants ayant perdu leur emploi (+ 57,6 %). La Normandie, la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie et les Pays de la Loire n’échappent pas à cette tendance : la montée du chômage des patrons s’établit à plus de 53 %. La Provence-Alpes-Côte d’Azur subi une plus faible évolution des pertes d’activités professionnelles avec une augmentation de 37,8 %, mais compte près de 2 500 patrons au chômage.
AB & BL